Partage de la progression de l’expérience méditative de M. Lefèvre Granclément, de Yogamrita.
"Le yoga me semblait une voie. Comment parvenir à goûter au moins à l’avant-goût des fruits de la pratique ? Car sans bonheur, ni joie, comment persévérer ? Comment toucher à l’« état d’être libre » ?
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En lien avec le Printemps des Enseignants, prévu le 05 avril 2025 sur le thème « comment introduire la méditation dans un cours », notre intervenante Christine Chaput partage avec vous la newsletter d’aout 2024 de Yogamrita. Yogamrita est une école de formation Yoga et Ayurveda, avec Michèle Lefèvre et Isabelle Moysan.
La newsletter d’août 2024 éclaire sur la progression de l’expérience de méditation de Michèle. En voilà un extrait, avec 2 poèmes, un de Kabir, l’autre de Ishan Jugil qu’elle y a joints. L’auteur, Michèle Lefèvre, nous a autorisés à publier son témoignage.
“Le yoga me semblait une voie. Comment parvenir à goûter au moins à l’avant-goût des fruits de la pratique ? Car sans bonheur, ni joie, comment persévérer ? Comment toucher à l’« état d’être libre » ?
Chaque chemin est différent et unique. Mais on remarque quelques constantes :
La détermination permet au chercheur de s’accorder l’espace-temps régulier de la pratique. La cohérence et le bon sens lui font adopter l’hygiène de vie qui va avec, dans le ni trop, ni trop peu, dans l’équilibre qui permet de durer, de dompter l’esprit, avec douceur et fermeté.
L’expérience du commun des mortels nécessite beaucoup, beaucoup de temps. Surtout au début.
Sur l’exemple de la méditation, je partage ce qui m’a le mieux réussi.
Méditer trente, quarante-cinq minutes, ou même une heure permet tout juste de calmer le mental du débutant. Rien de remarquable, me semblait-il : le « feu » de la transformation yogique ne pouvait opérer.
Méditer une heure et demie, deux heures ou plus, cela propulse dans plus de profondeur. Le méditant débutant se retrouve face à lui-même. Tout d’abord, le corps se manifeste, souffre, consume sa révolte… puis il se détend totalement et se dissout, dans l’oubli de sa propre densité. Le mental novice, conciliant au début, se révèle progressivement récalcitrant, bouillonnant, puis s’avoue fatigué : il capitule enfin. Soudain, l’esprit rentre dans l’assise : il est pleinement dedans… Il intègre et enregistre une expérience différente, voire renversante. Au fil des pratiques, l’esprit va apprivoiser l’assise prolongée, intégrer cet état d’être, tant et si bien qu’il y reviendra, de plus en plus vite et volontiers. Le goût pour la pratique acquis, tout devient plus facile. Et là, l’« état d’être libre » se fait plus intime… le corps et l’être s’en souviennent…
Désormais, il m’arrive de relire Kabir et les poètes Bâuls. Ils m’inspirent et donc, j’y reviens. La différence est que je n’ai plus envie de changer quoi que ce soit… ou si peu.
« Je ne suis ni pieux ni incroyant. Je ne vis ni par les lois ni par les sens. Je ne suis ni orateur ni auditeur. Je ne suis ni servant ni maître. Je ne suis ni prisonnier ni libre. Je ne suis ni attaché ni détaché. Je ne suis loin de personne. Je ne suis près de personne. JE SUIS.
Je n’irai ni en enfer ni aux cieux. J’exécute tous les travaux. Toutefois je ne suis lié à aucun. Peu comprendront ces paroles. Celui qui les comprendra, sera stable. Établi dans le Soi.
Kabir ne cherche ni à s’établir ni à détruire ». Kabir
« Comment mon cœur a-t-il fondu ? Je l’ignore… Dans l’extase de la vie, Dans l’extase de la mort, Mon cœur est ivre de joie… Ô Bien-aimé, Ne me fais pas languir en vain. Je n’attends plus rien, Ni du jour de demain, Ni du jour d’hier.
Tes bracelets de chevilles, Sonnent nuit et jour, Miracle ! je suis confondu… Où est la mer infinie ? Où est la rivière avec ses remous ? Si tu veux connaître Le flot de vie qui les unit, Marie ton cœur et tes yeux. Alors pour toi, Les « yeux de ton cœur » Verront la lîla, le Jeu de Dieu ». Ishan Jugi, le tisserand
Ces textes font écho à quelque chose qui s’apparente à la pratique, ils nourrissent mes forces et m’invitent à l’assise toujours renouvelée, et telle qu’elle se présente à moi, avec ses ombres et ses lumières. Tout est donc bien ainsi… et cette lettre à la Liberté restera inachevée…
Michèle Lefèvre Granclément, avec son aimable autorisation
Poème de Kabir
« Je ne suis ni pieux ni incroyant.
Je ne vis ni par les lois ni par les sens.
Je ne suis ni orateur ni auditeur.
Je ne suis ni servant ni maître.
Je ne suis ni prisonnier ni libre.
Je ne suis ni attaché ni détaché.
Je ne suis loin de personne.
Je ne suis près de personne.
JE SUIS.
Je n’irai ni en enfer ni aux cieux.
J’exécute tous les travaux,
Toute fois je ne suis lié à aucun.
Peu comprendront ces paroles ;
Celui qui les comprendra,
Sera stable. Établi dans le Soi.
Kabir ne cherche ni à s’établir ni à détruire »
Kabir
Poème d’ Ishan Jugi, le tisserand
« Comment mon cœur a-t-il fondu ?
Je l’ignore…
Dans l’extase de la vie,
Dans l’extase de la mort,
Mon cœur est ivre de joie…
Ô Bien-aimé
Ne me fais pas languir en vain.
Je n’attends plus rien,
Ni du jour de demain,
Ni du jour d’hier.
Tes bracelets de chevilles
Sonnent nuit et jour,
Miracle ! je suis confondu…
Où est la mer infinie ?
Où est la rivière avec ses remous ?
Si tu veux connaître
Le flot de vie qui les unit,
Marie ton cœur et tes yeux.
Alors pour toi,
Les « yeux de ton cœur »
Verront la lîla, le Jeu de Dieu »
Ishan Jugi, le tisserand