Une vie bouleversée (suivi de Lettres de Westerbork)
Le coup de coeur de Josselyne Lorin
Etty Hillesum est l’auteur de ce témoignage, effectivement bouleversant, que j’ai éprouvé le désir de relire récemment, une trentaine d’années après ma première lecture et, étonnamment, deux mois environ avant le 7 octobre.
Un hymne à la vie et à l’amour par-delà l’horreur des guerres.
Etty était une jeune femme juive Hollandaise; elle aurait pu échapper au sort réservé aux juifs au cours de la deuxième guerre mondiale; elle ne l’a pas fait.
Rencontre décisive avec un proche de C.G Jung; Julius Spier, psychologue et chiromancien juif allemand, auprès duquel elle entreprend un riche voyage intérieur.
« La vie est belle et riche de sens » écrit-elle en leitmotiv, et ce dans un contexte où il n’est plus possible de se mentir à soi-même: celui du camp de transit de Westerbork.
Elle meurt à Auschwitz le 30 novembre 1943.
Etty est habitée d’une force intérieure qui lui fait porter un regard d’une honnêteté sans faille sur sa propre intériorité, ses propres fonctionnements, ses « faiblesses » dont nous sommes tous porteurs qui l’amènent à voir derrière l’apparence des choses et à réaliser qu’au plus profond de soi est l’amour.
Ce journal est extrêmement dense et j’ai hésité à en donner des extraits, lesquels ne sauraient rendre compte de l’extrême richesse de la totalité de l’oeuvre.
Cependant voici:
« On peut nous rendre la vie assez dure, nous dépouiller de certains biens matériels, nous enlever une certaine liberté de mouvement tout extérieure, mais c’est nous-même qui nous dépouillons de nos meilleures forces par une attitude psychologique désastreuse. En nous sentant persécutés, humiliés, opprimés. En éprouvant de la haine. En crânant pour cacher notre peur. On a bien le droit d’être triste et abattu, de temps en temps, par ce qu’on nous fait subir: c’est humain et compréhensible. Et pourtant, la vraie spoliation c’est nous-mêmes qui nous l’infligeons.
Je trouve la vie belle et je me sens libre. En moi des cieux se déploient, aussi riches que le firmament. »
« Mais Seigneur, donne-moi la sagesse plutôt que le savoir. Ou pour mieux dire: seul le savoir qui mène à la sagesse vous apporte le bonheur, et non celui qui mène au pouvoir. Un peu de paix, beaucoup de douceur et un peu de sagesse, quand je sens cela en moi tout va bien ( journal 1941- 1943).